Lotte Arndt / Goethe-Institut Fellowship 2016OCTOBRE – DÉCEMBRE 2016

Vue d’exposition, Cinquantenaire Museum (Royal Museums of Art and History), Bruxelles, 2016. Crédits : Lotte Arndt

Le Goethe-Institut et la Villa Vassilieff ont créé ensem­ble en 2016 un pro­gramme de bour­ses à des­ti­na­tion de com­mis­sai­res d’expo­si­tion alle­mands. Chaque année, un com­mis­saire est invité à déve­lop­per un projet de recher­che à la Villa Vassilieff, en par­te­na­riat avec une ins­ti­tu­tion alle­mande et avec la pos­si­bi­lité de dia­lo­guer avec de nom­breu­ses ins­ti­tu­tions (musées, archi­ves, écoles, ou mem­bres de la société civile). Cette bourse est attri­buée en paral­lèle des pro­gram­mes Focus, orga­ni­sés chaque année par le Goethe-Institut dans une ville ou un Land alle­mand.

Pour sa pre­mière édition, la bourse est attri­buée à Lotte Arndt, com­mis­saire, théo­ri­cienne, écrivaine et ensei­gnante venue de Cologne, en conver­sa­tion avec la Temporary Gallery (Cologne, Allemagne).

 

SI NOUS HABITIONS UN SEUIL


Par Lotte Arndt

Franchir un seuil équivaut à établir une limite, une fron­tière. Se trou­ver d’un côté ou d’un autre. Dedans ou dehors. Faire partie ou être exclu.e. Se retrou­ver dans des alter­na­ti­ves qui s’oppo­sent. Le seuil y figure comme le trait phy­si­que, loca­li­sa­ble, uni­taire par lequel le pas­sage se fait sans même le frôler. Mais il est aussi bien sou­vent la limite par laquelle le pas­sage est rendu impos­si­ble, limite qui empê­che, retient, repousse, sépare.
Or, si nous habi­tions le seuil, il s’avè­re­rait divi­si­ble à l’infini. Il glis­se­rait en per­ma­nence, se décom­po­se­rait dans des bor­du­res sutu­rées, plu­riel­les, dis­conti­nues et mobi­les, en cons­tante trans­for­ma­tion. Il ne ces­se­rait de mul­ti­plier les points de pas­sage qui se défè­re­raient déjà en se des­si­nant. Il ne four­ni­rait jamais un fon­de­ment cons­tant et solide, mais une zone par­fois opaque, sans cer­ti­tu­des, par­fois éparpillée en mille éclats, res­plen­dis­sants, atti­rants et dan­ge­reux.

Le pré­sent projet pro­pose de se tenir dans ce glis­se­ment per­ma­nent, en rap­pro­chant deux sphè­res qui parais­sent dans un pre­mier temps éloignées, voir oppo­sées : les objets patri­mo­nia­li­sés dans les musées d’eth­no­gra­phie et d’his­toire natu­relle et le besoin fon­da­men­tal d’habi­ter, dans un sens large, comme une néces­sité de pre­mier ordre, une condi­tion sine qua none pour les êtres sociaux, d’être chez soi dans la société au sein de laquelle ils.elles évoluent.

Les deux jour­nées d’ate­lier qui concré­ti­se­ront les inter­ro­ga­tions menées dans le cadre de la rési­dence invi­tent à inves­tir la zone trou­ble du seuil en revi­si­tant deux aspects inti­me­ment liés à l’exis­tence his­to­ri­que de la Villa Vassilieff, pour en tirer des liens vers des pos­si­bles réper­cus­sions contem­po­rai­nes. Le lieu et les vécus qu’il a abri­tés au début du ving­tième siècle (en l’occur­rence, ses entre­croi­se­ments avec le cou­rant pri­mi­ti­viste ainsi que l’ate­lier trans­formé en can­tine) seront pris comme point de départ pour nouer des mul­ti­ples fils de récits qui atten­dent leur inven­tion, leurs croi­se­ments, et leur tra­duc­tion dans le pré­sent.

Lire la ver­sion inté­grale du texte ici.

BIOGRAPHIE DE LOTTE ARNDT

Lotte Arndt ensei­gne à l’Ecole d’art et de design de Valence depuis 2014. En 2013, elle achève sa thèse consa­crée aux revues pari­sien­nes pre­nant pour objet l’Afrique, et tra­vaille comme cher­cheuse en rési­dence à l’Ecole d’art de Clermont Métropole. Elle a été la coor­di­na­trice du projet de recher­che artis­ti­que « Karawane » qui accom­pa­gna le mon­tage du Pavillon Belge par Vincent Meessen et Katerina Gregos à la Biennale de Venise de 2015. Elle fait partie du groupe de recher­che « Ruser l’image » et publie régu­liè­re­ment autour des notions de pré­sent post­co­lo­nial et des stra­té­gies artis­ti­ques visant à sub­ver­tir les ins­ti­tu­tions et dis­cours euro­cen­trés. Ses publi­ca­tions récen­tes incluent Crawling Doubles. Colonial Collecting and Affect (avec Mathieu K. Abonnenc et Catalina Lozano), Paris, B42, 2016 ; Hunting & Collecting. Sammy Baloji, (avec Asger Taiaksev), Brussels, Paris, MuZEE and Imane Farès, 2016 et Les revues font la culture ! Négociations post­co­lo­nia­les dans les pério­di­ques pari­siens rela­tifs à l’Afrique(2047-2012), WVT, 2016.

 

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